Pour parcourir ce monde en parfaite révolution, je vous propose une approche que j’ai intitulé :
Vade-Mecum , A l’usage des voyageurs, “honnêtes hommes” dans le monde des années 20.*
* Il s’agit des années 2020-2030
Table of Contents / Table des matières
ToggleActe 2 : L’Etat du monde.
Part 1 – Géopolitique.
Nous étions dans l’acte 1 dans la description des mécanisme qui font fonctionner le monde, ceux de l’économie politique notamment.
Il faut désormais regarder ce qu’est aujourd’hui le monde , et comment on peut imaginer qu’il évoluera.
Je déploie ici une vision de la géopolitique qui m’est propre.
Je connais les grandes théories et inclinaisons du moment, les plus anciennes sans remonter a Clausvitz, mais celle de Brezinsky par exemple et sa vision de l’Eurasie. Pour cette vision américaine on peut que constater la force d’analyse et sa réalité prédictive jusqu’aux années 2010.
Mais il y a aussi la vision des démographes et anthropologues comme E.Todd, dont la démonstration de l’implication politique des fondements ethniques et anthropologiques autour des structures de parentés sont très éclairantes, pour, par exemple, comprendre ce qui fédère les pays qui forment aujourd’hui le Sud Global, en rejet radical de l’occident et de sa culture honnie.
Enfin il faut évoquer la vision géopolitique nord américaine actuelle , qui façonne le nouveau rôle des Etats-unis pour permettre la conservation d’un leadership , en gardant une puissance économique dominatrice et une puissance militaire écrasante. Après ses nombreux échecs cuisants les US refuse d’être le gendarme du monde. Dans cette nouvelle politique américaine , axée sur la maîtrise de sa façade asiatique, l’Europe n’a qu’a bien se tenir, si elle veut survivre.
La plus part de ses visions n’ont pas encore pris la mesure des changements, dans la vraie vie , que vont imposer ; la transformation des paradigmes centraux de l’économie politique, les conséquences à retardement de l’explosion démographie, la puissance du changement climatique et de la biodiversité, la fin de l’abondance des ressources primaires, énergétique ou non, l’effondrement de la biodiversité.
Elles n’ont pas encore mesuré non plus la remise en cause radicale par une partie des peuples du monde de la visions occidentale de la géopolitique.
Nous verrons combien sur ces points les réalités que nous connaitrons probablement demain sont bien différentes de celles d’aujourd’hui.
Il faut rechercher des voies adaptatives pour tous ces sujets si sensibles. Ce sera l’objet principal , après cet acte 2, des actes suivants. Commençons par l’état du monde qu’il faut considérer , l’état des principales stratégies en place et les évolutions en cours ou prévisibles.
Mondialisation et géopolitique.
David Ricardo expliquait , dans son livre « Des principes de l’économie politique et de l’impôt » que les nations ont intérêt à se spécialiser dans les productions où elles ont l’avantage comparatif le plus fort. S’interprète aussi comme l’avantage ou il y a le moindre écart relativement à plusieurs pays par exemple. C’est-à -dire une différence, de toute nature, qui fait qu’elles peuvent vendre leurs productions mieux que d’autres nations qui produisent ou tenteraient de produire le même bien, ou service.
Il n’est pas possible de résumer la mondialisation à ce seul principe , mais il en est le moteur principal. De toute évidence la Chine, aux coûts de main d’œuvre parmi les plus bas de ces 20 dernières années , a produit, et produira encore un certain temps, massivement des biens industriels pour l’ensemble de la planète. D’autres géants de l’Inde au Brésil sont dans cette logique productive évidemment. Plus finement, il faudrait rechercher les biens par nation qui sont devenus l’apanage de leurs industries de biens et de services à l’échelle mondiale ou continentale au moins.(Voir analyse de Pascal LAMY pour l’OMC OMC | Nouvelles – Allocutions – Pascal Lamy – L’avantage comparatif est mort?…).
l’avantage comparatif n’est pas qu’une question de coût de production, un savoir faire peut en être l’origine comme dans le luxe. La France est bien placée pour le savoir, pour ses sacs à main, ses parfums ou ses vins.
Notons que là aussi comme pour la définition des biens, voir ACTE 1, l’avantage comparatif ne porte pas que sur les biens matériels. L’avantage offert par une place financière, historique, puissante , très expérimentée, comme Londres est évident par exemple.
MN : Il y a aussi un grand danger dans la perte de notre autonomie concernant les biens de première nécessité: autonomie alimentaire, que nous perdons peu à peu, un exemple: en 2000 nous importions 10% de notre conso de poulet ,en 2019 nous en importions 45%…, ; autonomie sanitaire, comme nous venons de le vivre et découvrir avec les masques et les médicaments.Cette autonomie a un coût, elle me semble obligatoire pour la survie et l’existence d’une nation, de l’idée même de nation peut être même? est-ce que cela empêcherait ou ralentirait la mondialisation?
PDI : Cette notion Ricardienne, de l’avantage comparatif, ne dit rien d’un retour à l’autonomie ou à des principes de sécurité alimentaire ou sanitaire. Problématique que la récente crise du Covid19 vient de mettre en exergue. Il nous faut une réflexion stratégique, sur cette question, pour faire des choix en fonction de la valeur opérationnelle des biens que nous importons , mais aussi tactique, pour choisir les bons positionnements porteurs d’autonomie. Pour autant cette atténuation du principe en change t’elle tout le contenu ? Le raisonnement, de l’autonomie sécuritaire, peut être tenu à l’échelle de l’Europe en premier lieu. C’est une bonne question , à évaluer certainement pour l’avenir. Le risque est de revenir à un protectionnisme excessif.
Avant de poursuivre, revenons sur le modèle capitaliste dans la mondialisation, et la redistribution à l’échelle mondiale..
Le théorème de Marx évolue t-il ? (Voir Acte 1)
Concentration du capital , crises et destruction du capital, accumulation du capital, aucune de ces règles n’est changée , elles évoluent dans un contexte nouveau. Et en effet , la création des sociétés Hyper-Multi-nationales, leur autonomie affichée par rapport aux nations, enjeu d’une lutte sans merci avec les états-nation dépossédés de leurs prérogatives, montrent bien que ces principes d’accumulation et de concentration du capital sont bien toujours à l’œuvre. Que dire de ces crises qui verront bientôt peut-être disparaître les géants de l’ancien monde , les géants du pétrole, de l’aéronautique ou de l’automobile…L’arrivée des nouveaux véhicules dont l’électronique embarquée représente plus de la moitié de la valeur en est le signe. Destruction du capital pour rebondir encore plus haut , encore plus concentré. Même si nous devons bien admettre que ce capitalisme là à bien changé de forme, il y a toujours un capitaliste qui concentre d’énormes moyens de production pour aller toujours plus loin, haut ? Elon Musk et la conquête de Mars. Ne nous a t-il pas promis 1 million d’Hommes sur Mars en 2040 ?
Et le théorème de Piketty ? (Voir Acte 1)
L’étude menée par Branko Milanovic , reprise par Piketty qui l’amplifie largement, montre que précisément l’enjeu aujourd’hui est dans la mondialisation. L’écart croissant créant une société d’hyper riches, toujours plus puissants et devenant autonomes, renvoie à la problématique de la re-distribution
Des auteurs comme Jacques Attali,(2) envisage même des sociétés privées affranchies des Etats-nations et de leur contingence géographique , qui en quelque sorte n’auraient plus d’appartenance géographique nationale , comme nous l’entendons aujourd’hui.
Là encore le principe est invariant, le théorème de Piketty est encore valide si nous voulons préserver un équilibre politique et social de nos sociétés. Il l’est encore plus si nous considérons les efforts gigantesques que nous nous apprêtons à demande au reste du monde.
Le principe économique de base, l’avantage comparatif, explique la raison fondamentale du mouvement de la mondialisation et de la forme qu’il prend ici et là. Le théorème de Marx et de Piketty nous expliquent pourquoi, comment et vers où nous allons économiquement et, le risque de cette course.
La théorie Ricardienne ne suffit pas à tout expliquer, elle donne, dans un monde où le principe du “tout chose égale par ailleurs” serait vrai, une explication économique de la spécialisation des nations. L’exemple récent de la Chine montre que cette explication n’est pas suffisante notamment quand pour des raisons de géostratégie un pays conduit une politique économique expansionniste très ciblée.
MN :Peut-on ajouter pour la Chine principalement un “avantage politique” ?
PDI:Cette question renvoie à une vison du système politique le plus efficace pour le capitalisme. Je ne sais pas y répondre à ce stade.
Dans “ la guerre des métaux rares” Guillaume Pitron explique que les pays riches se sont aperçu que l’extraction des métaux rares posait de graves problèmes environnementaux. Mais, à la même époque, dans les années 85/90 la Chine a fait du dumping économique en cassant ses coûts de production, dans ce cas d’extraction des métaux, se créant ainsi peut être un avantage comparatif. Dans le même temps elle a réalisé aussi du dumping “environnemental” en n’incluant pas dans ses coûts de production le coût de réparation des dommages écologiques. Assumant volontairement le coût supplémentaire, non pas dans le seul but de produire, mais dans celui de dominer politiquement en rendant les pays utilisateurs de ces métaux totalement dépendants, c’est une action de stratégie géo-politique.
DDI: Il faut donc aller plus loin et intégrer la vision géopolitique du monde.
MN: Mais alors justement comment expliquer, comprendre, l’état réel , géographique et politique de cette mondialisation aujourd’hui.. ?
Tout d’abord l’Histoire du monde :
En effet la situation aujourd’hui, est issue de notre histoire complexe. Dans l’ère économique moderne depuis plusieurs siècles au moins, les grandes conquêtes , les grandes ambitions, positionnent les nations les unes par rapport aux autres. La colonisation, les guerres mondiales,… à chaque fois il en sort un équilibre, ou peut-être un déséquilibre, complexe.
En rapport avec la mondialisation “récente” disons 50/60 dernières années, une fois la guerre mondiale achevée, ce qui semble être le fait le plus marquant dans cet après-guerre , c’est l’émergence chinoise qui a transformé le monde dans ses rapports de force et de domination. Progressivement l’empire américain perd de sa puissance, du moins doit-il céder du terrain, et accepter qu’un autre géant change les axes et les équilibres , ce que l’URSS n’avait pas réussi pleinement. Mais l’histoire ne s’arrêtera pas, la Chine prend une place importante avant que l’émergente Afrique ne prenne le relai peut-être ?
Avant, ou au tout début de la grande mondialisation économique moderne, à la fin des trente glorieuses, Alain Peyrefitte ( Ministre du Général De Gaulle) , a publié en 1975 un livre intitulé “Quand la Chine s’éveillera, le monde tremblera. “ (1). A cette époque les commentateurs étaient nombreux à être un peu dubitatifs , nous doutions que cela puisse réellement arriver un jour. La différence de régime et l’écart de culture et de richesses paraissent tels que la primauté de l’Amérique triomphante de Nixon puis de Ford ne pouvait être remise en question. L’ennemi c’était l’impérialisme américain. Mais que dirions nous aujourd’hui ?
Les faits sont là, nous en sommes à la nouvelle route de la soie proposée par Pékin. Hong Kong est en voie d’être « normalisée » par le régime chinois.
Ce mouvement puissant ne pourra s’arrêter là , et si la Chine marque de façon majeure la mondialisation pour les 20 prochaines années, l’Afrique marquera sûrement autrement, mais très fortement l’évolution du monde dans les 50 ans qui viennent.
Au fond ce qui semble préoccuper le plus dans le court terme les citoyens de nos pays, ce sont plus les effets immédiats ou presque de la mondialisation sur notre monde occidental que le long terme et la survie ou l’adaptation au monde futur.
Nous pouvons le regretter, seuls quelques sages, ou fous, ont une vision plus large et dans le long terme. La crise actuelle, par exemple avec la prise de conscience de la nécessaire indépendance stratégique, permettra-t-elle de forcer cet aveuglement ?
Nous lui attribuons donc tous les maux de la terre , délocalisations de production et chômage, ou même les effets climatologiques, ou sanitaires du fait des transports, des pollutions urbaines et aériennes.
La mondialisation a été, est, une opportunité extraordinaire, qu’en avons nous fait ?
Le moteur invisible de la civilisation :
“ Mondialisation” , vous avez dit “Mondialisation” , mais finalement de quoi ?
Peut-être que la principale conséquence en est la « standardisation des modes de consommation ». C’est celle qui aura à terme le plus d’importance pour deux raisons majeures à mes yeux :
- Elle importe un modèle de société et de vie partout où elle passe. C’est-à-dire que son pouvoir d’acculturation est si fort , par exemple, que tout le monde veut un smartphone, elle impose dans la société un certain rapport à la technologie, au pouvoir, à la santé… Et de fait prive progressivement, mais avec peu de retour arrière possible, les “acculturés” de précisément ce qui faisait leur culture propre. C’est aussi une question éthique, ce modèle détruit les autres cultures.
MN : Ou alors il impose une domination plus sournoise par l’effacement de civilisations à l’avantage comparatif plus faible ou nul parce que non marchand.
- Elle est climatologiquement décisive. car la poursuite, dans les conditions actuelles du développement économique, conduit là aussi inexorablement au changement climatique, réchauffement , montée des eaux, réfugiés. Elle est donc le moteur essentiel de cette course au développement.
Voir le film « les dieux sont tombés sur la tête » Jamie Uys 1980.
Précisons qu’il ne s’agit pas de promouvoir le bonheur occidental de la surconsommation comme le bon modèle par définition pour toute la planète, non je parle de son aspect inexorable ou du moins inévitable, dominant.
Partout les cultures anciennes régressent, en Australie ou en Amazonie par exemple où elles sont menacées par la déforestation .
Cette question peut nous ramener vers ceux qui souhaitent, imaginent, pensent possible, une catastrophe, climatique, sanitaire, … qui serait une maïeutique salutaire.
MN : Inexorable? Pourtant il y a des résistances, avec les mouvements tels que l’écologie intégrale, avec le recyclage sous toutes ses formes, etc. Je vois au moins la volonté d’un frein à cette surconso prôné par les jeunes générations.
PDI : Les “résistants” de tous bords , écologiques, politiques ont tellement de mal à le combattre , et nous pouvons seulement espérer que les générations montantes soutenues par tous ceux qui auront fait ce choix finissent par l’infléchir. Greta Thumberg en est un exemple “égérique” même s’il questionne.
Entre 1970 et aujourd’hui ce qui a changé, dans ce modèle, c’est que nous sommes passés de la Canette de Coca au SmartPhone. Ou plutôt de l’American Way of Life (AWOL) à la World Wild Way of Life (WWWOL) .
Le smartphone en est le symbole, devenu un appendice extracorporel extraordinaire parce qu’il emporte, contient, l’essentiel de notre société en quelques centimètres et centaines de grammes. Il illustre la puissance technologique, l’incroyable mondialisation de la communication par internet, l’instantanéité devenu principe permanent des relations humaines. Il impacte toutes les couches sociales et générations humaines, il transforme notre rapport au monde… Par définition l’homme est un animal social et dont le niveau de communication est très élevé, le smartphone devient son 7eme sens ou 3ème bras ou deuxième cerveau peut être surtout. Il crée une sorte de réseau neuronal sans équivalent en connectant nos cerveaux entre eux et en leur donnant accès à une base de données d’information sans limite. Peut être l’ultime étape avant une complète connexion de nos cerveaux par la bio-cybernétique, la bionique. C’est encore Elon Musk qui étudie une connexion neuronale qui permettrait par exemple d’incorporer directement des livres entiers ou l’accès à ces livres dans le cerveau humain.
Mais voilà, on ne peut pas vivre qu’avec un smartphone, la terre peut-elle supporter ce Standard-Modèle global pour l’ensemble des 8 milliards d’hommes que nous serons bientôt ? Le modèle WWWOL après le AWOL a du plomb dans l’aile.
Enfin les enjeux vitaux de la géopolitique.
Il y a donc des enjeux géopolitiques peut-être plus colossaux que nous l’imaginons.
- Attendu que nous pensions que la réponse à la question des capacités terrestres à supporter le poids du développement humain actuel est ‘non’.
MN: A-t-on de vraies preuves? Comment en sommes-nous sûrs? N’allons-nous pas trouver de nouvelles technologies, manières d’exploiter etc ?
Les ressources et l’accès ainsi que l’ingéniosité humaine évoluent.
PDI: Nous pouvons penser dans l’absolue que la limite est certaine, même si elle peut être reculée, limite pour nos ressources terrestre, pour la détérioration climatique induite par nos pollutions, et bien d’autres dysfonctions comme le risque sanitaire que nous venons de connaître. Ces réalités qui s’imposent progressivement empêcheront la poursuite dans les mêmes conditions et au rythme actuel du modèle de développement existant.
Nous pouvons opposer à cette vision malthusienne (1) , la force du génie humain, de sa capacité, toujours vérifiées, à trouver de nouvelles solutions, et notre histoire montre ou prouve que nous avons cette incroyable capacité à contourner, révolutionner pour toujours et avancer au delà des obstacles. Cette énergie folle et extraordinaire nous sauvera certainement. Mais là aujourd’hui nous devons garder un réalisme, même si nous pouvons gagner du temps. Le changement climatique n’est pas une chimère. Les villes les plus polluées de la planète sont bien là où se produit ce développement exponentiel , en Chine en Inde, en Afrique, en Amérique centre et sud , alors même que nos pays plus anciens commencent à avoir quelques victoires et que des solutions peuvent peut-être se profiler avec le moteur à Hydrogène par exemple.
Et plus avant pouvons nous priver les pays émergents de ce développement ?
MN : une chose est sûre, on ne peut pas opposer l’avenir de la planète à l’accès à des biens dont rêvent ces pays après en avoir profité nous-mêmes…leur imposer de s’en priver au nom de la protection environnementale ressemblerait à de la manipulation ( livre de Sylvie Brunel, géographe “toutes ces idées qui nous gâchent la vie”)
PDI: Comment imaginer que nous puissions le faire ? Cela me semble impossible ou très dangereux pour la paix.
MN: Est-ce qu’il pourrait aussi y avoir un mouvement retardé: une fois que les pays émergents seront arrivés à notre niveau de conso, la prise de conscience de cette surconsommation ne provoquera-t-elle pas un ralentissement comme celui que nous commençons à souhaiter?
PDI: Très probablement, on montre déjà par exemple qu’en Chine les salaires de base ont progressé fortement et que le fameux avantage comparé diminue, les ouvriers chinois veulent des vacances, être mieux payés, et des libertés …Peut-être que c’est aussi une sorte de course contre la montre, quand on voit que se développe aussi en Chine, une volonté d’avoir moins de pollution citadine par exemple. Mais aurons nous suffisamment de temps ?
- Et si la réponse à la question, sur les capacités terrestres à supporter le poids du développement humain actuel est ‘oui’, pouvons nous accepter les conséquences environnementales et écologiques que cela induit ?
MN: Quelles sont-elles? Peut-on déjà les évaluer de façon précise ? ,
PDI: il est sûrement extrêmement difficile d’évaluer précisément ce point, pour plusieurs raisons, par exemple nos modèles ne sont pas suffisamment fiables, ils ne prennent pas en compte complètement nos capacités à réagir, à faire évoluer les choses. Et donc ils se trompent puisqu’ils ne font que projeter plus ou moins mécaniquement des tendances extrapolées sur des jeux de données de ce que nous connaissons à date. Ce qui a changé c’est que nous arrivons à franchir des valeurs, qui à l’échelle de notre planète, montrent des points de non retour, les glaces fondues , ne re-gèleront pas de sitôt, la montée des températures ne pourra pas s’inverser avant longtemps etc.
A ce stade que pouvons nous tenir pour certain, de façon très triviale je dirais : “globalement ça chauffe, sa pollue beaucoup, ça s’épuise, ça meurt …” Ce que nous pouvons savoir par exemple c’est que le taux de CO2 doit diminuer impérativement ou être freiné partout où cela est possible. Qu’il faut dépolluer l’air, les sols , la mer , ou arrêter de les polluer. qu’il faut protéger la diversité animale et végétale…
Examinons encore deux axes d’approche que nous pouvons rattacher à la mondialisation :
La finance internationale quel rôle joue-t-elle ? et la gouvernance géopolitique des nations , comment le monde travaille ensemble ?
Finances et monnaie outils de la mondialisation
Comment l’économie mondialisée se finance ? Les instruments financiers internationaux, transnationaux, ne sont-ils pas devenus une fin en soi ?
Il nous faut compléter notre compréhension des mécanismes financiers et non seulement monétaires, comme dans l’ACTE 1.
Axiome 1: Tout financement externe de l’économie par un état correspond à une dette. C’est-à-dire que chaque fois qu’un état a besoin de liquidités pour son économie, comme par exemple pour financer son déficit structurel, il demande au marché des capitaux mondiaux de lui prêter les sommes nécessaires , pour une durée et à un taux déterminés.
Ce n’est qu’un exemple, des banques peuvent être opérateurs sur ces marchés, emprunteurs ou prêteurs.
Les “prêteurs” sont alors d’autres pays, comme les Emirats arabes, des opérateurs financiers, des Assurances, des Banques centrales. Il y a plusieurs marchés en fait, un par type de transactions financières.
Axiome 2: Toute dette s’exprime sous la forme d’un montant monétaire, d’une règle de remboursement, d’un taux d’intérêt quel que soit son sens ( Positif ou négatif) et d’un délai de remboursement.
Corollaire 1 : Ces dettes qui prennent une forme purement scripturale, ligne d’écriture comptable , sont donc regroupables . C’est ce qu’on appelle de façon imagée souvent un “véhicule”, qui contient des parts de dettes ou des titres obligataires principalement.
Pour rendre pleinement efficace financièrement cette opération de regroupement, les opérateurs financiers cèdent leurs propres créances, comme des prêts, à une société faite expressément pour cela dite société “ad-hoc”. A son tour, la société finance cette acquisition en créant de nouvelles actions ou obligations. Actions ou obligations à leur tour cotées en bourse par exemple ou proposées à des investisseurs comme des banques ou assurances, des investisseurs institutionnels souvent. .
Cette opération est appelée une “titrisation” des dettes. Elles sont exprimées dans une monnaie internationale , le dollar US, le Yen japonais, le Yuan chinois ,l’Euro aussi.
C’est ce qui constitue la grande masse des capitaux mondiaux en circulation.
Corollaire 2 : Une fois regroupés, “titrisés”, donc marchandables sur une bourse mondiale, ces objets Financiers acquièrent une certaine autonomie de valeur, et de détentions par divers types de tiers.
Les grandes nations détiennent une très grande part des dettes souveraines des autres États.
Par exemple la Chine et le Japon détiennent à eux deux une grande part de la dette américaine détenue hors US, ( plus de 30 %) , mais l’Europe, les émirats en détiennent également. Le plus curieux c’est que c’est aujourd’hui la FED, le trésor américain, qui est le principale créancier de la dette américaine.
Pour mémoire la dette américaine avoisinait les 22 000 Milliards de Dollars. en 2018
Cette autonomie sur les marchés de la dette est à la fois un risque, celui des marchés , et une chance car les dépendances croisées diminuent les risques “aberrants” des États ou des entreprises mondiales.
Le traitement actuel des crises financières.
Pourquoi la BCE, par exemple, rachète les titres financiers des banques centrales nationales et des opérateurs financiers ? :
Quand cela ne se passe pas très bien du fait d’une crise par exemple, effondrement des prix , besoins de liquidités, les banques centrales rachètent des actifs financiers aux banques. C’est ce que fait en ce moment, depuis le début de la crise financière de 2008, la BCE par exemple. Le faisant, elle redonne aux acteurs financiers sur ces marchés de l’argent , des liquidités, et supprime ces parts de dettes qui encombrent leurs bilans, et qui les fragilisent. Une fois cédés à la banque centrale contre de la monnaie, ces acteurs peuvent investir dans l’économie. Ces liquidités récupérées créent alors de nouvelles valeurs, des biens immobiliers par exemple, ou fournissent des capitaux aux entreprises, et bien d’autres emplois.
Nous voyons maintenant que ces capitaux financiers internationaux ne dépendent pas que des états, plus ou moins de certains états, mais pas de la plupart. Il y a donc une vie propre de ces actifs financiers, une cotation en bourse par exemple.
Pour bien comprendre l’architecture financière mondiale prenons un exemple de cet échafaudage financier et des risques qui peuvent s’y rapporter :
The Serious game.
Une banque détient des prêts auprès d’emprunteurs, disons des particuliers américains ayant acheté des maisons avec un emprunt bancaire, si tout se passe bien, les banques seront remboursées à hauteur de 98%, 99% de ces prêts, éventuellement grâce à l’hypothèque prise sur le bien, plus un intérêt qui couvrira les pertes, 1 ou 2%, mais aussi génèrera un excédent significatif en valeur globale.
Pour ces banques finalement, ce volume de prêts peut être considéré comme un actif qui peut être valorisé. Que se passe t-il alors ? :
- Imaginons que le banque émette un nouveau titre financier en créant une société qui achète les prêts, par exemple en créant un nouveau type d’obligations ou d’actions. Ces actions par exemple sont garanties par la masse de ces prêts qui vont être remboursés et qui sont rentables à cause des hypothèques prises, du taux d’intérêt demandé et payé et d’un taux de défaillance supportable .
- Imaginons maintenant que ces nouveaux « titres » soient proposés sur une bourse d’échange et fassent l’objet d’un cours. Ce cours aura toutes les chances de monter parce qu’il paraît sûr et rentable. Et donc cet actif se “sur-valorise”, parfois de façon considérable, par le jeu de l’offre et de la demande comme pour une action d’entreprise ou pour un secteur d’activité. C’est alors la création de ce que nous appelons ‘une bulle financière’.
Nous avons connu un “accident mémorable” basé sur l’écroulement de cette chaîne de valeur financière, c’est la fameuse “Crise des SubPrimes” , basés sur les prêts immobiliers aux ménages américains dont les éléments de compréhension pédagogiques sont décrits ci dessus .
Depuis nous avons pris des précautions, nous avons mis des gardes fous et des instruments de stabilisation, pour éviter que cela se reproduise, même si on doit encore considérer que la situation n’est pas optimale et présente toujours des risques. L’imagination des financiers semble sans limites..
Le cas des états souverains et de la dette souveraine ( la dette des états souverains) :
Un état est réputé être un solide garant. Les titres qu’il émet pour son financement ou l’emprunt qu’il fait, sont réputés sûr. Cette ”sécurité” se mesure principalement à sa capacité à prélever l’impôt pour payer ses dettes. ( c’est la capacité de soutenabilité de la dette). Cette capacité s’apprécie en fonction de la qualité de son système fiscal et de la force de son économie qui permet l’impôt. Voilà pourquoi la note internationale financière de la France n’est pas trop mauvaise , et celle de l’Allemagne excellente, et que donc le risque Français nous permet d’obtenir des taux encore assez bas d’emprunt sur le marché international, ce qui rend la dette française supportable. Jusqu’à quand ? (NDLR : depuis Mai 2024 ce raisonnement devient moins sur)
Aparté : Nous entendons parler d’annulation de la dette. Bien qu’une dette doit toujours être remboursée , il y a des exceptions qui sont liées à la nature particulière des émetteurs de monnaie, les états , sans compter sur un mécanisme économique bien connu « l’inflation ». En effet eu égards aux risques que font courir certaines dettes qui deviennent non remboursables par l’emprunteur, il peut devenir préférable de ne pas en exiger le remboursement , au risque de voir s’effondrer des états et entraîner dans leur chute des pans entiers d‘une économie nationale voire de l’économie mondiale.
Du fait de sa capacité à remplacer un titre correspondant à une dette par une émission de monnaie, un état peut annuler une dette, dans la mesure où l’émission de monnaie est absorbable par le marché financier , c’est à dire réinvestissable dans l’économie réelle. E. Macron en France a proposé l’annulation d’une partie des dettes Africaines par exemple.
A fortiori des organismes puissants comme la BCE, si on l’autorise à le faire, les banques centrales… peuvent aussi le faire dès lors que les états les autorisent à produire de la monnaie en remplacement de la dette annulée. C’est en quelque sorte l’état , par sa planche à billets, qui rembourse la dette.
Après l’avantage Ricardien qui explique le moteur de la mondialisation, la finance mondiale qui en donne le carburant ou le sang , il y a encore un domaine important , c’est celui de la gouvernance mondiale, ou comment nous travaillons ensemble ou pas ?
Comment se manifeste la remis en cause de l’hégémonie financière de l’occident.
Il faut bien dire que dés la mise en place des sanctions déjà sur l’IRAN,1989 et ensuite sur la Russie, et compte tenu de la soumission des pays émergents au Dollar, il fallait bien qu’un jour , certains imaginent le moyen d’en reprendre le contrôle.
Même si aujourd’hui nous sommes encore loin du compte, l’alliance forcée de la Russie de la Chine, de l’Inde, et de l’ensemble des BRICS va inévitablement conduire à une émancipation progressive de ces pays vis a vis de cette domination financière.
Nous avons évoqué le jeu de dupes entre les créanciers et les débiteurs mondiaux de la dette exprimées en Dollar.
Ce n’est pas fait , mais par exemple il est possible que dans les quelques années qui suivront la réunion de Kazan des BRICS en Russie , le système de contrôle des échanges bancaires mondiaux appelé SWIFT, n’ait plus l’hégémonie des échanges. Nous avons , pays occidentaux, imposé et probablement avec raison, l’exclusion de la Russie de ce système bancaire. D’une part cela n’a pas eu l’effet escompté, par de multiple contournements la FDR est parvenue à maintenir ses échanges mondiaux à un niveau lui permettant de survivre sans utiliser SWIFT. En toute logique , La Chine, l’Inde et la Russie associés à l’ensemble de BRICS et au monde Arabo-persique à les moyens désormais d’imaginer un autre circuit qui ne sera plus totalement soumis à l’influence occidentale. Même si l’interêt commun n’est pas la destruction du système financier , les règles du jeu et des pouvoirs devront évoluer. Il en ira de même sur un autre sujet déjà évoqué , la gouvernance mondiale, et la transformation de l’ONU.
Comment se gouverne le monde ? :
Comment se répartit le pouvoir aujourd’hui entre Chine, US, Europe, Russie, et les Émergents ? Avec quels organes est gouverné le monde ?
Il serait ici impossible de redonner toute sa dimension à cette question, nous allons juste apporter quelques tendances actuelles.
Les organismes gouvernementaux , internationaux, de l’après-guerre sont multiples, ONU, FMI… , les groupes de concertation multi-latérale très nombreux , G7, G20. Jusqu’ à l’OMS ou l’UNESCO, la FAO, l’OMC, pour coordonner des politiques d’aides , de réglementation,… sans compter les organismes non gouvernementaux.
Ces multiples sources de gouvernance sont donc en compétition permanente entre elles et avec les états , chacun ayant un poids différent bien sûr, des stratégies propres.
Les US : Par exemple dés 2017 et l’arrivée de D.Trump au pouvoir, le gouvernement américain veut reprendre une part du pouvoir qu’il a perdu face à la Chine par exemple, et donc , L’OMS, L’ONU, L’OTAN sont remis en cause. Les plus grands accords comme celui de la COP 21 sont également rejetés. Il ne faut pas se tromper, ce n’est pas D.Trump qui est le seul à le souhaiter, bon nombre d’américains ont compris qu’un combat homérique se déroulait pour une prise de pouvoir mondiale, il y a donc un courant politique fort pour un repositionnement stratégique US sur la scène mondiale.
C’est la stratégie du dominant. Il est en position de force et Joe Biden à partir de 2021 suivra peu ou prou cette inclinaison naturelle des US. Que l’election récente de D.Trump pour un deuxième mandat ne peut que relancer et probablement accentuer.
La FDR (Fédération de Russie) : La Russie mène sa propre stratégie mondiale, toujours historiquement proche des régimes en rupture du consensus majoritaire, très logiquement elle soutient et manœuvre autour de la Turquie, de l’Iran. Elle renforce sa présence en Afrique ou en Amérique du Sud, notamment depuis la guerre en Ukraine, dans sa stratégie d’affaiblissement de l’ouest. Sa stratégie qui semblait plus axée sur la prise de position tactique, par exemple les points qui verrouillent son accès aux matières premières, s’oriente plus vers de nouvelles influences politiques régionales dans le cadre du « Sud global », par exemple , pour trouver, entre autres à L’ONU, des alliances stratégiques. En Octobre 2024 la Russie. accueille les BRICS à KAZAN. C’est un tournant important pour la Russie, en se rapprochant des BRICS et du sud Global, il est incontestable qu’elle marque un point vers un retour comme puissance mondiale majeur, mais elle le fait au travers des BRICS et du Sud Global, et donc pas seul. Elle vise d’ailleurs à un monde qu’elle dit Multilatéral et non plus bi-polaire.
Actuellement, la Russie, même après son rapprochement médiatisé avec la Chine, que cette dernière contrôle, est gênée par la Chine sur ces différents terrains et ce n’est pas une alliance avec la Corée du Nord en 2024 qui changera cette tendance qui s’accentue. La FDR suit sa stratégie propre qui ne se ralliera à celle du Sud Global que de façon opportuniste.
C’est la stratégie du faible, ou du puissant dominé.
MN: Vous me direz mais alors l’Ukraine ? ,
PDI: Et bien oui, c’est une stratégie faible, elle est gagnante en reprenant l’Ukraine , elle est perdante parce qu’elle ne concerne que sa zone d’influence très proche, presque à vocation domestique. C’est une des raisons importantes de la relative faiblesse des protestations. Vladimir Poutine le sait, il a pris un pion sur l’échiquier, mais qu’un pion. Cette reprise correspond à sa stratégie globale du verrouillage régional entrevue ci-dessus. Il faudra qu’il développe une vision plus internationale pour vraiment réussir cette stratégie. Son accord récent avec Pyongyang, ne lui fait que gagner du temps en soulageant un peu ses problématiques de recrutements et d’alimentation de son armée en arme diverses et surtout en obus.
La CEE : La CEE est désunie , elle a très peu de pouvoir apparent, mais une grande influence, économique, ou morale et politique. C’est économiquement, sur le papier, la première puissance mondiale, un peu moins sans les Anglais. Elle noue et dénoue des alliances objectives temporaires en tentant de suivre sa stratégie basse pression. C’est -à -dire une stratégie d’influence, de déplacements tactiques , peu coûteux mais comme un coin dans l’arbre. Elle fait ce qu’on pourrait appeler des coups blancs, c’est à dire des coups qui ne visent qu’à montrer sa présence ou à détourner l’attention pour avancer ailleurs. C’est donc avec du retard, sans force d’entrainement que l’Europe plus préoccupée de ces dissensions internes et de la montée de son extrême droite, avance doucement.
En Europe seuls, l’Allemagne et la France ont des politiques internationales visibles et assez autonomes.
La France a apporté une influence Africaine certaine, et à très long terme, si elle peut protéger ce capital d’influence malgré les attaques de la Russie et de la Chine en Afrique, ce sera peut-être décisif dans une Afrique par définition morcelée.
Pour le moment l’Europe et la France recul en Afrique, il faut certainement faire le dos rond.
L’Allemagne reconstitue progressivement une politique étrangère dont elle s’était privées en quasi totalité jusqu’alors. Elle reprend progressivement position sur le moyen-orient, l’Ukraine et dans l’Europe centrale. Elle garde encore sa force économique dans le monde.
Il reste que globalement, l’Europe est faible dans son attitude et sa position a l’internationale. C’est certainement un enjeu de moyen terme très important, d’autant plus si les états unis , ce qui semble se profiler, se désinvestissent de l’Europe en terme de protection militaire et de présence dans l’OTAN. Républicains et démocrates Américains, sans être totalement d’accord sur ce point vont, malgré tout vers une logique ou une Europe vassale, ou ils s’engageraient moins leur conviendraient.
Mais Il ne faut pas négliger cet effet d’action en étoile, certes il n’y a pas de front uni, mais de redoutables dents partout. Jusqu’à quel point face à des mastodontes monobloc, cette stratégie en crabe , en étoile n’a t-elle pas une certaine efficacité ?
D’une façon un peu caricaturale, parce que les influences se croisent, nous pourrions dire que, symboliquement, les deux pays fondateurs fédèrent les grandes actions politiques de l’Europe : à la France la présence internationale, les opérations militaires, les légionnaires, à l’Allemagne le poids économique, le pilon de la pression financière.
Sur ce plan un regret, les anglais sont partis.
C’est la stratégie du politique. Economiser les moyens, prendre des positions stratégiques, pesés de tout son poids morale et économique.
La CHINE : La Chine se sait puissante, inquiétante, et elle l’est.
C’est le seul méga-pays aujourd’hui qui pourrait, peut être, sortir vainqueur d’un affrontement physique généralisé. C’est le seul pays qui peut vivre en autarcie, avec ses ressources rares, ressources agricoles, industries de base et de services. pour autant tant d’un point de vue historique, elle ne l’a jamais fait, que celui de la doctrine actuelle de la chine et à l’exception de Taiwan , la chine n’a aucune volonté d’expansion physique.
Il lui manque encore une influence planétaire hégémonique sur les autres nations. En dehors de quelques inconditionnels, elle n’a pas assez de points d’appuis. C’est la raison aussi de son offensive sur l’Afrique. Devenir le mécène de l’Afrique apporte non seulement une domination sans partage sur les ressources rares mais aussi lui assure les appuis en nombre de voix qui comptent dans le Méga-Dédale de la gouvernance mondiale, et une position tactique pour l’avenir quand “l’Afrique s’éveillera” à son tour.
C’est la stratégie de l’Outsider puissant
Les grands émergents:
Inde, Brésil, Mexique, ils sont encore des nains sur la gouvernance mondiale, ils sont encore trop isolés ou trop “inféodés”. Ils peuvent faire l’appoint en nombre de votes, soutenir tour à tour les US, la FDR, la Chine…la CEE, au gré de leurs intérêts propres ou de leurs alliances de circonstance. Mais leur poids est très faible pour le moment.
A l’exception de la réalité géoéconomique des BRICS. ( voir ci-dessous, l’émergence du SG.)
C’est la stratégie de la chaise vide ou du drapeau flottant. Tant que les grands régimes d’Amérique du Sud ne se stabiliseront pas , ce continent pesera moins qu’il ne le pourrait.
Les grands influenceurs : Émirats pétroliers, Iran, Turquie, Turquie … Ils ne sont pas encore très liés entre eux, ils sont néanmoins presque tous dans les BRICS, La Turquie demanderait son adhésion au BRICS, mais chacun à sa façon à un pouvoir d’influence important.
Ils se distinguent par leur pouvoir de nuire ou par leurs alliances objectives, comme avec la FDR, autour du pétrole, ou des votes Onusiens. Ils sont craints parce que dangereux, du terrorisme à l’embargo sur le pétrole. Leur appui peut être dans un certain nombre de configuration ou de déflagration salutaire pour influencer. Par exemple comme a pu le faire la Turquie avec la Russie dans la guerre avec L’Ukraine .
C’est la stratégie du fou, en diagonale vengeresse.
Le sud Global ou SG:
C’est un concept apparu ses 5 dernières années, cette notion nait pratiquement dans le décompte des voies lors d’un vote contre lors de la tentative occidentale de la condamnation de l’invasion Russe de l’Ukraine , en Février et Mars 2022. La cartographie des pays votants contre ou s’abstenant dessine une opposition Sud et Nord. Au Nord se regroupe les pays dits Occidentaux.
La FDR a lancé une opération séduction et amplifie actuellement son action pour se rapprocher d’un Sud Global qui est vu comme une ligue anti-occidentale, le Sud Global commence tout juste à peser. La FDR aimerait un accord sur les moyens de paiement.
Aujourd’hui ce Sud global, au delà de rendre complexe les votes des résolutions Onusiens, ne pèse pas beaucoup. La Russie ayant un droit de véto au conseil de sécurité, tente de s’imposer comme un leader. La même Russie qui en réunissant les BRICS en octobre 2024 à Kazan à réussie à donner un contenu politique et économique à cette notion de SG.
Nous saurons si cette stratégie a réussie dés que l’ONU et les organisations Onusiennes devront évoluer sous la pressions du SG, en modifiants ses mandats, ses moyens , ses missions et les formes de gouvernance existantes.
Mais rien n’indique que la Russie puisse se maintenir comme leader, l’Inde et surtout la Chine ne laisseront pas faire cette prise de pouvoir. Aujourd’hui tout indique que l’opportunité Russe les intéressent , du fait du droit de véto et parce qu’elle a permis de cristalliser et de rassembler les refus et les rejets de l’occident.
En résumé disons que le conseil de sécurité est dominé par l’occident, il faudra faire une place au « Sud » et probablement transformer les formes et toutes la gouvernance de cette organisation, ou en faire émerger une autre ?
Que pouvons nous donc conclure pour notre sujet ?
La gouvernance mondiale a un sens , elle suit les pouvoirs, contre-pouvoirs que nous venons de décrire sommairement, elle ira donc dans ce sens, qui transfère progressivement plus de pouvoir à la Chine et qui voit les US se cabrer sur ce qui restera de son Empire, en attendant qu’un autre grand naisse peut être, l’Afrique certainement, mais qui est, comme l’Europe, pluriel et aura probablement une stratégie que j’ai qualifié de « politique » comparable à celle de l’Europe dans sa forme.
Seul l’émergence d’un groupe comme le Sud Global peut véritablement à la fois déséquilibrer la gouvernance mondiale existante et autoriser l’apparition d’un monde multilatéral nouveau. Nous parlerons plus loin de Multilatéralisme dynamique , pour marquer à la fois l’apparition de plusieurs pôle dans le pouvoir mondiale et le fait que les agrégats de pays pour des accords multiples se développent déjà et se développeront encore. Nous en trouvons déjà les traces avec les BRICS, en Amérique du sud (MERCOSUR) , en Asie les accords de sécurité indo-pacifique, .. petites ou grandes alliance régionales plus ou moins étendues, elles pourront être multiples et évoluer avec le temps. Mélangeant probablement des pays ou des organisations existantes appartenant à plusieurs pôles. La Turquie, l’Australie, le Brésil en sont des exemples actuellement.
Aparté : La dissuasion nucléaire, et la guerre des étoiles.
Nous le savons tous maintenant, la course aux armements a repris, dans le ciel.
La dissuasion nucléaire n’a un impact stratégique réel que pour les États qui n’ont pas ou pas complètement cette dissuasion et qui pourraient être trouble fête s’il l’avaient. C’est à dire menacer d’être capable de l’utiliser, par pure folie, localement, la Corée du Nord par exemple, pour s’imposer régionalement, Israël, le Pakistan et l’Inde, sans risquer une déflagration mondiale immédiate , à la différence de la Chine , les US ou la FDR, qui eux se dissuadent vraiment.
Notons que cette capacité de nuire va se jouer en partie dans l’espace. Les moyens en seront la destruction des moyens de communication, l’incapacitation à mener une riposte. Ce sont donc les nations capables d’envoyer des fusées dans l’espace qui reprennent la main militaire et guerrière. US, Chine, CEE, Inde, FDR.
Il va devenir moins grave de laisser, l’Iran , Israël, la Corée du nord, avoir leur bombe, elle ne leur sera plus que d’une utilité très relative localement pour faire peur.
Après cette vision de stratégie/Tactique et Géo-politique il faut ajouter deux angles d’approche, la démographie et l’écologie. La démographie parce qu’elle fonde notre présence sur cette planète et qu’elle évolue en permanence basculant zones de pouvoirs et de risques. Et l’écologie, parce qu’elle nous annonce la fin programmée du monde.
Enfin nous tirerons quelques leçons d’économie politique. ( voir Acte 2 : Part 2)
NDLR : Multilatéralisme Dynamique :
Le terme multilatéralisme dynamique fait référence à une approche évolutive, flexible et proactive des relations internationales, où plusieurs acteurs (États, organisations internationales, sociétés civiles, et autres) collaborent pour résoudre des problèmes globaux ou régionaux. Cette approche diffère du multilatéralisme classique en insistant sur l’adaptation rapide aux défis émergents et sur des formes variées de coopération, souvent en dehors des structures traditionnelles.
Caractéristiques du multilatéralisme dynamique :
Flexibilité institutionnelle :
Plutôt que de s’appuyer uniquement sur des structures rigides comme l’ONU ou l’OMC, il favorise la création de coalitions ad hoc, de forums informels ou de partenariats publics-privés.Inclusion d’acteurs non étatiques :
Il reconnaît que des ONG, des entreprises multinationales, des universités et même des individus jouent un rôle clé dans la résolution des défis mondiaux.Réactivité aux crises :
Le multilatéralisme dynamique est conçu pour répondre rapidement aux crises complexes telles que les pandémies, le changement climatique, ou les cybermenaces.La multipolarité s’accroît :
Avec l’émergence de puissances régionales comme la Chine, l’Inde ou le Brésil, le multilatéralisme dynamique reflète une redistribution du pouvoir mondial, s’éloignant d’une domination exclusive par l’Occident.Approche thématique et sectorielle :
Plutôt que de tout traiter via un cadre global, il met l’accent sur des collaborations spécifiques (par exemple, des accords sur la réduction des émissions ou la protection de la biodiversité).
Exemples de multilatéralisme dynamique :
- Les Accords de Paris sur le climat (où des États, des villes et des entreprises travaillent ensemble au-delà des cadres interétatiques traditionnels).
- Les coalitions comme le GAVI (Alliance pour les vaccins), regroupant gouvernements, ONG et acteurs privés.
- Les initiatives régionales telles que l’ ASEAN ou l’Union africaine, qui adaptent leurs efforts en fonction des besoins locaux.
En somme, le multilatéralisme dynamique est une réponse à un monde de plus en plus interconnecté, fragmenté et incertain, où l’unilatéralisme ou le bilatéralisme sont souvent insuffisants pour relever les défis collectifs.
Références et renvois de l’ACTE 2 :
- Malthus Obsession de la rareté Malthusienne
- Conférence T.Parrique HEC
- F.GEMENE : Géopolitique du climat
Cet essai se compose ainsi : (Liens intégrés)
Préliminaires : Vade-mecum , Pourquoi et comment.
Acte 1 : Mise en perspectives et Principes d’économie politique.
Acte 2 : L’État du Monde.
Part 1 : Géopolitique(Cet article)
Part 2 : Démographie, Ecologie , Economie politique.
Acte 3 : Une nouvelle économie politique pour une nouvelle politique.
Acte 4 : Que pouvons nous faire, prospectives.
Acte 5 : Fin de Partie, Nous y sommes.
En savoir plus sur Some-ideas ou Quelques idées
Subscribe to get the latest posts sent to your email.