Vade-Mecum (2/7) : Acte 1 , Introduction aux Principes de l’économie politique.

ACTE1 : Principes d’économie politique.

NB : Apparaissent en fil du texte des questions posées par les premiers lecteurs de ce Vadémecum , MN, et mes réponses , PDI. 

Climat, COVID19, Ukraine : le Changement de paradigme

Pendant environ 30 ans, de 1945 à 1975, entre euphorie et demi-conscience le monde a progressivement basculé dans le consumérisme, en occultant,  les risques de déflagration majeures et le sur-développement économique (développement économique extrême, exagéré, immodéré, …) aux conséquences désastreuses, mais pas immédiatement visibles, sur la nature et le climat. 

Cette période porte le nom des “ Trente Glorieuses “. Il faut considérer aussi que durant cette période, toutes les zones géographiques, ne vivent pas alors à ce rythme : la Chine, l’Inde , l’Amérique du sud ,la plupart des pays de  l’Asie et de l’Afrique, dits alors  ”en voie de développement” , sont pauvres et souvent dominées par des régimes autoritaires, manipulés par les grandes puissances de coup d’état en coup d’état , ou bien  corrompus. Même si cette expression est évidemment trop réductrice, elle correspond à une grande part de la réalité.

Ensuite, dans ce monde dit alors bipolaire (Est-Ouest) , puis multilatéral, avec l’émergence de l’Asie, de l’OPEP ,  les grands équilibres mondiaux se font autour des matières premières… Des crises comme celle du pétrole en 1976 sont l’expression de ces recherches de dynamiques capitalistes et d’équilibre géopolitique. 

A partir de 1990-2000, la grande mondialisation entreprise quelque temps auparavant, est à l’œuvre. Le fait géopolitique majeur en reste l’apparition de géants,  Chinois , Indiens puis Brésilien.. 

Les équilibres économiques du monde se recentrent vers l’Asie , la Chine et l’Inde, certes progressivement mais de façon inéluctable.
Les formes capitalistiques évoluent. Les Hyper-Multinationales prennent place, comme les GAFA aux US, et autres Compagnies mondiales ALI-BABA, HUAWEI en Chine. Les deux puissances économiques majeurs commencent leur affrontement économique.

En 2001 le 11 septembre , le terrorisme frappe un grand coup, au coeur même de l’empire américains. 

C’est le signe d’un monde qui change , d’une géopolitique qui échappe aux grandes puissances. 

La Crise de 2008 apparaît comme une secousse financière inattendue liée à l’évolution du capitalisme dans sa forme financière aux Etats-unis. Elle entraîne une crise occidentale dite des dettes souveraines. 

Le capitalisme encore une fois s’adapte, il rénove ces outils de contrôle financier, institutionnalise les outils monétaires de stabilisation et de mutualisation des dettes, transfère les risques vers les garants de la solvabilité que sont les banques centrales et donc les États.  La leçon de 1929 semble avoir été retenue. Certains comme J.K Galbraith ont, en effet, pu dire que : « c’est probablement du fait du non soutien des états aux banques et au système financier que l’on peut imputer la gravité de la Grande crise de 29. »

A cette grande géopolitique il faudrait consacrer plus d’un livre et de nombreux auteurs ont su le faire. 

En Février 2022 , un coup de tonnerre a résonné dans nos vies avec l’invasion Russe en Ukraine. Certains y voient le début d’une troisième guerre mondiale. Cette guerre montre, outre les limites géopolitiques et militaires de nos politiques depuis 30 ans au moins, la relative insouciance donnée par le confort dans lequel vivait l’occident. Elle provoque une réévaluation des relations politiques internationales, rôle de la chine .., mais aussi et surtout d’un point de vue économique elle conduit à un choc qui remet en cause nos certitudes sur la mondialisation, les choix stratégiques pour l’énergie, les matières premières, l’agriculture. 

A bas bruit dans un premier temps, puis de façon plus visible,  la crise climatique s’annonce , et nous nous lançons dans une bataille complexe et difficile. Nous instituons un rendez-vous périodique politique mondial pour en parler , les COPs,  et nous tentons de mettre en place une logique mondiale de réduction de nos productions de GAZ à Effet de Serre ou GES.  

Ce que pourrait bien avoir fait évoluer la crise actuelle, celle du COVID-19, ou celle de la guerre en Ukraine, c’est de nous conduire plus rapidement à la prise de conscience de ce nécessaire équilibre moderne avec le climat, la santé, l’écologie, la solidarité sociale, si vitale pour notre société , ce que nous appellerons ici développement « durable » par exemple. 

Il faut alors interroger la notion de développement dans un contexte de ressources qui n’est pas infini.
Faut-il alors parler de décroissance ?

A la liberté, l’équité et la fraternité nous ajoutons donc le développement durable.

Nous avons retrouvé une définition des finalités, nous pouvons reprendre la course à ce nouvel équilibre ?

MN : Qu’est ce que le Covid a à voir avec l’écologie et le climat?
PDI : C’est un effet de ricochet, en nous contraignant à l’arrêt total , le Covid nous a obligés à réfléchir, poussés par quelques Cassandre qui n’ont pas manqué de lier la pandémie aux risques de la mondialisation et de la destruction des espaces sauvages et de leur conquête absolue par l’homme.  C’est effectivement drôle, étrange,  un moment cathartique. 
MN : La définition, c’est ce dont vous parliez précédemment, c’est-à-dire climat, santé, écologie et solidarité sociale? 
PDI : Oui la définition se complète de cette idée de développement durable qui inclut, climat, écologie, solidarité , elle vient compléter notre vison liberté, égalité fraternité  , elle devient un nouveau paradigme, ou nous changeons l’égalité en équité.
MN: J’aime bien que l’équité remplace l’égalité qui est devenue obsession égalitaire. 
PDI : C’est l’idée, attention en perdant l’égalité un peu mécanique, un égal un , nous trouvons avec l’équité quelque chose de moins facile à gérer car dépendant d’un jugement impartial ou non . Mais je préfère aussi cette idée, Méfions nous quand même des conséquences négatives comme le nivellement vers le bas, l’équité a tendance à nous amener à compenser… 

MN : Mais l’égalité cela veut dire pareil pour tout le monde en ne tenant pas compte du tout des différences de toutes sortes, c’est un peu nier les personnalités et les richesses de chacun, presque une entrave à la liberté . 
PDI : C’est pour cette raison que je préfère l’équité. L’équité tient compte des différences, mais , qui juge de la validité de cette compensation ? Il y a un risque de partialité ou d’erreur…

Nous sommes entrés dans un de ces moments critiques où le monde change définitivement et assez radicalement. Jusqu’à quel point , me semble être la seule question ? 
Pouvons nous imaginer, peut-être pour nous rassurer, que du fait des forces de résistance et de résilience, nous aurons un peu de temps pour nous adapter et que les grands changements se produiront assez lentement , avec des à-coups et finalement plutôt bien ?

Les théoriciens de la décroissance semblent penser que seule une crise de rupture pourra marquer le début d’une ère nouvelle , et ils doivent tous rêver qu’elle se produise en ce moment avec notre ami Covid19. Certains pourront même être tentés de l’aggraver, pour aller peut être vers un “ grand soir ”  cher aux révolutionnaires. 

Cette crise sanitaire, qui peut, va se doubler ou redoubler de bien d’autres crises, sociales, économiques et politiques, géopolitiques, est probablement aussi une opportunité. Va t’elle nous permettre de réfléchir et d’imaginer une voie d’évolution différente intégrant les nouvelles donnes géopolitiques, climatiques et écologiques…  ?  Pas si sûr.

Aujourd’hui, un pseudo consensus social, est-il le socle sur lequel nous pouvons sereinement penser une économie transformée, de nouveaux modes de production, la prise en considération de l’urgence climatique ou écologique, avant qu’une nouvelle catastrophe n’arrive, et ne risque cette fois d’emporter jusqu’à nos démocraties ? 

Se pose alors la question des échelles de décision. La dimension durable, nous oblige particulièrement avec acuité à considérer que nombre de nos orientations et décisions n’auront de force que si elles sont collectives et dans ce cas mondiales.

Il n’est que de voir nos difficultés européennes, avec ce risque majeur de division aujourd’hui Nord-sud de l’Europe par exemple, pour se rendre compte de la difficulté que nous affrontons. 

Un accord international vers l’objectif de durabilité de nos décisions est improbable et pourtant indispensable.

Que dire des efforts fait pour la COP21,22, et de la tentative de D.TRUMP, accompagnée de quelques fidèles comme J.BOLSONARO, pour une destruction méticuleuse des accords sur le climat ? Même si depuis le début de 2021 et en 2022 , Joe Biden, président des États Unis, semble vouloir retrouver un chemin qui paraît plus raisonnable au monde…
Mais l’est-il vraiment aux yeux de beaucoup d’Américains ? Et quel est le sens exacte de la géopolitique américaine, est elle si différente de celle pratiquée par D.Trump ?
D.Trump revient au pouvoir en début 2025

Dans cette logique de développement durable, si complexe, se pose la question de la démographie. En effet que veut dire, et surtout quels efforts impose une économie durable sur le base de 6, 7, 8, 9 Milliards d’êtres humains dans une éco-système respecté ? Faut-il penser que nous sommes trop nombreux ? 

Pour aborder ce monde d’après, je propose d’essayer de regarder quelques lignes de force et les mécanismes du monde actuel, pré et post-Covid19, puis ensuite, de sentir , d’ébaucher, les nouveaux paradigmes du monde qui peut se dessiner maintenant.

Pour établir ce travail, il faut expliquer et constater en premier lieu.
Il faut expliquer les mécanismes et les règles de fonctionnement sous jacentes à nos sociétés , L’économie politique en est une des racines les plus importantes.
Il faut ensuite constater, et décrire l’état du monde, les lignes géopolitiques, démographiques, économiques qui le définissent et évoluent vers un futur. 

Enfin il faudra tenter de projeter dans le temps et l’espace les tendances lourdes , les inflexion notables. 
A l’issue de ce travail nous aurons une vision plus claires et complète de l’état du monde et de la façon dont il semble évolué et ou il semble se diriger.

Dans les éléments de compréhension et d’orientation qui vont suivre, je vais commencer par un sujet apparemment connexe, les principes de l’économie politique et celui de la distribution ou re-distribution des richesses.

Principes d’économie politique

Remarques : Je vais appeler “Théorème” quelques énoncés qui me paraissent résumer des règles de fonds qui permettent de comprendre et d’analyser. j’utilise aussi la notion d’axiome ou de corollaires – sorte d’analogie avec les mathématiques.

REDISTRIBUTION – Le théorème de Piketty

L’écart des richesses entre les hommes augmente.

Pour résumer, dans l’économie mondiale , l’écart de richesse s’accroît entre le % le plus riche des hommes et tous les autres. l’appauvrissement relatif est certain dans le temps.
Sur les 40 dernières années, cet appauvrissement porte sur les plus pauvres mais aussi sur les classes moyennes, par exemple américaines, et sur les premiers niveaux des classes supérieures. Cette démonstration est apportée notamment par les études publiées dans le livre « Inégalités mondiales, le destin des classes moyennes, les ultra-riches et l’égalité des chances » de Branco Milanovic. Préfacé en France par Thomas Piketty.

En valeur relative, toutes les catégories socio-professionnelles , CSP, sont touchées c’est un phénomène d’expansion de l’univers , tous les points sur le plan s’éloignent simultanément avec la même vitesse origine comme lors d’une explosionmodélisable et modulé par période. Une analogie avec la théorie de la relativité est-elle possible ? Quid de l’observateur et de la valeur relative du mouvement alors ? 

En France bien que cette logique de distribution à l’envers, car elle attribue plus aux très riches , montre aussi des limites, car cet accroissement des écarts y est plus limité grâce au système économique et social français, Socialo-Économico-politique devrions-nous dire. 

Les dispositifs de sécurité sociale, maladie, emploi, retraite font un très bon amortisseur. De fait, lors de la plupart des chocs économiques, pétroliers, financiers , la France est un peu moins touchée que les autres pays, mais, a contrario, redémarre aussi plus tard.

Situation révolutionnaire 

En redonnant toujours plus aux très ou ultra riches, quel que soit leur mérite, le système économique mondialisé actuel crée un risque révolutionnaire fort de plus en plus visible. Dans les pays les plus riches une part, je dis bien une part, de ce malaise ne repose que sur un ressenti personnel , puisque que l’appauvrissement est tout de même relatif pour la plupart des acteurs individuels. Notre beau système démocratique porte en lui cette conscience de la différence, en engendrant une frustration particulière parce qu’il permet à chacun de voir, constater et espérer. Nous avons connu, par exemple, un mouvement social appelé “gilet jaune”.  Sans parler d’une hauteur maladroite, Il faut avoir du respect pour ce cri social, de malaise, de souffrance, et cette volonté de changer nos rapports pour les rendre “plus humains”. 

Le simple “ rendez vous compte ce n’était “”pas”” mieux avant “ ne pourra suffire à calmer cette rancœur, même s’il recouvre une vérité. 

Faisons ici une apparté : L’évolution démocratique peut être une clé pour sortir de cette impasse, car elle autorise plus de coresponsabilité. En permettant à chacun de participer au plus près des décisions et en examinant donc les hypothèses et solutions qui concourent à une décision , les solutions démocratiques participatives, et non seulement consultatives , améliorent la pleine compréhension des enjeux multiples et des risques. En cela elles concourent à permettre l’émergence de solutions consensuelles, équilibrées et comprises. alors mêmle qu’elles sont complexes.  

Nécessité de le re-distribution

Pourquoi donc poser cette question de la redistribution en premier ? 

La raison est simple, elle est principalement éthique, parce qu’elle donne du sens politique à nos constructions économiques nous pourrions l’exprimer ainsi  :  

  • si, et seulement si,  nous disons souhaiter une société apaisée, dans notre état actuel de sociétés libres et communicantes, une redistribution jugée plus équitable est une nécessité pour qu’elle soit une société politiquement viable et stable… Nous l’appellerons Théorème de Piketty.

Thomas Piketty, en France, porte ce type de message fort. Ce théorème reste valable quel que soit le monde d’après.
Peter Turchin aux Etats Unis , fait une analyse de ce type, c’est a dire : « qu’il montre que les grandes crises surviennent lorsque plusieurs dynamiques sont réunies : l’enrichissement excessif des plus aisés, l’appauvrissement des classes populaires et l’apparition d’une élite surnuméraire se déchirant pour le pouvoir. Autant de forces à l’œuvre aux Etats-Unis depuis les années 1970, et, dans une moindre mesure, en Europe. » Le monde , Art. de Marie Charel avec Peter Turquin , 25/11/2024

Extrait :

« Quelle est l’origine de la crise que traversent les Etats-Unis ?:

Elle a des racines historiques profondes, liées à ce que j’appelle la « pompe à richesse ».
Dans les années 1920, les Etats-Unis étaient en crise. Celle-ci a été résolue par le New Deal du président Franklin Delano Roosevelt [élu en 1932], qui a établi un contrat social implicite équilibrant l’intérêt des entreprises et des travailleurs….. une forte taxation des hauts revenus, ont également permis une période de baisse des inégalités et de prospérité . »

 » … ce contrat social s’est dégradé dès la fin des années 1970, lorsqu’une nouvelle génération d’élites,… est arrivée au pouvoir avec l’administration Reagan. Celle-ci a réprimé les mouvements de travailleurs, allégé la fiscalité des plus fortunés. … Les salaires ont commencé à décrocher par rapport à la croissance, …  la « pompe à richesse » s’est mise en place. Le nombre de super-riches, détenant au moins 10 millions de dollars est ainsi passé de 66 000, en 1983, à 693 000, en 2019… »

Quelles en pourraient être les principes, ceux qui permettraient cet équilibre entre redistribution sociale des richesses et préservation de la liberté individuelle et de la récompense de l’effort personnel ? 

MN :Pourquoi et comment la liberté individuelle est-elle impliquée dans cet équilibre? 

PDI : Parce que la redistribution est autoritaire et qu’elle risque de priver l’individu de sa liberté d’entreprendre ou la réduire. La surimposition confiscatoire par exemple… 

L’objectif majeure des ses 70 dernières années semble avoir été de permettre à la classe moyenne d’atteindre le standard de consommation.

Finalement nous avons considéré, de fait, que le minimum de répartition acceptable était celui qui permet à une classe dite moyenne, ayant vocation à être la plus nombreuse, de jouir et profiter de l’essentiel des biens de consommation que je qualifie ici de standard de consommation. C’est -à -dire , des biens matériels: voiture,  télévision, logement, smartphone,… et des services, voyages, financiers…qui satisfont largement les besoins primaires et une très grande partie des besoins supérieurs. Voir pyramide de Maslow.(1)

Sans compter la liberté de choisir en partie des modes de vie communautaires réels ou plus ou moins virtuels, religieux , alimentaires, bourgeois-Bohême…

Pourquoi avons-nous échoué en partie ?
Que s’est il passé qui explique l’échec de ce modèle à satisfaire le plus grand nombre et la constatation de l’écart exponentiel de richesse qui perturbe et rend insupportable la situation sociale ?
Il n’y a pas de chemin critique, au sens d’un chemin unique et obligatoire qui amènerait d’un point de départ à un point d’arrivée,  vers l’équilibre, nous ne pouvons pas déterminer avec un degré de certitude satisfaisant, 80% de chance par exemple, les décisions, les actions, en bref les politiques qui permettraient d’accéder à cet équilibre. De plus, le développement du capitalisme induit ses propres forces endogènes, selon un modèle de concentration du capital que nous verrons plus loin dans notre raisonnement.

La cible mouvante 

La cible, c’est-à-dire, la répartition « acceptable », est mouvante et l’incroyable complexité, tel un réseau de neurones et synapses , des liens et interactions rend tout modèle déterministe ou mécanique illusoire ou à valeur très locale. Si l’enchaînement des actions était prévisible et les réactions parfaitement anticipables alors une suite de décisions pourraient conduire à un résultat presque certain. Or ce n’est pas le cas, nous avons l’expérience d’une multitude de mesures économiques qui ne donnent pas le résultat attendu, voire nous donnent un résultat contraire. A une échelle réduite , donc dans un environnement plus facile à maîtriser ou évaluer, certaines décisions économiques peuvent se révéler efficaces, comme la création d’un réseau d’AMAP local (Association locale de Producteurs distribuant directement leurs productions). Et dans le même temps cette solution n’est pas suffisante au regard des concentrations démographiques urbaines par exemple. 

Il faut chercher, trouver et mettre en place, cette «  inclinaison économique et sociale décisive » qui court à cet équilibre en espérant qu’une main invisible fera le reste. Cette proposition revient à dire qu’en proposant une série de mesures propices à déclencher des comportements vertueux , c’est à dire, dans le sens souhaité, par exemple « durable », on peut par effet de contagion et d’orientation, ou fléchage, initier un mouvement dans le sens souhaité. Hélas l’aspect incertain réapparaît, à chaque décision des agents économiques et donc l’effet global reste incertain. Les économistes classiques ont appelé ce mouvement axé mais un peu hasardeux , la main invisible. Et les politiques fléchés sont le royaume des conseils en communication. 
On peut également dire que cette main invisible, c’est l’accord progressif, itératif, des offres et demandes individuelles et collectives.

Nous sommes en permanence dans cette Recherche d’Équilibre, cet accord sur le prix économique, mais aussi sur les finalités, comme maintenant avec la vision « durable ».

MN : c’est un rapprochement possible avec la Loi de la thermodynamique: “tout élément qui arrive à son point d’équilibre crée de lui-même et en lui-même les conditions de son déséquilibre” C’est la complexité qui exacerbe ces incertitudes car tout bouge en permanence. Rien n’est figé, tout évolue et est en perpétuel mouvement.
PDI: oui, belle analogie,  il faut admettre que tout système du vivant serait lui aussi redevable des mêmes règles issues de la physique. Nous verrons plus loin que le capitalisme contient ses propres mécanismes qui le conduisent aux déséquilibres, vérifiant ainsi aussi la loi de la thermodynamique peut-être ? 

Nous voulons maximiser le bien être de chacun, donc permettre à chacun d’avoir les ressources suffisantes pour l’obtenir, il faut donc permettre, de quelque façon que ce soit, une distribution ou une re-distribution des revenus qui l’autorise. Distribution entre capital et travail, ou re-distribution de revenus par le biais de politiques économiques et sociales que nous voulons justes et efficientes.

Si nous voulons re-distribuer , il faut avoir quelque chose à distribuer, nous allons donc nous intéresser à cette idée : qu’est ce que produire ? Comment crée-t-on de la valeur ?

PRODUIRE – CRÉER de la valeur : Le théorème de Marx.

Modèle économique de MARX

Sans adhérer aux idéaux politiques marxistes, nous prenons l’exemple de Marx, parce qu’il est très complet, non seulement il étudie minutieusement le mécanisme du capitalisme, mais il en dévoile ses intrications sociales et politiques.

Si on suit le modèle marxiste, l’histoire du capitalisme est l’histoire de l’accumulation du capital, et de la lutte des classes. Marx décrit, avec une compréhension remarquable , les mécanismes d’accumulation du capital. Il explique très bien ce qu’il appelle “l’aliénation de la force de travail’ qui en est le moteur , l’énergie, de cette accumulation, en vue de l’enrichissement du capitaliste.
Je ne vais pas revenir sur tous ses principes, résumons en disant , que pour fabriquer , il faut des machines et des hommes. Que le capitaliste possède les machines et les débouchés commerciaux, et que,  pour réaliser cette production, il lui faut la force de travail fournit par les hommes.
Les hommes ne fournissant pas leur force de travail sans compensation pécuniaire ou matérielle, il faut donc un contrat avec eux qui permette d’utiliser légalement cette force. Nous excluons donc le principe de l’esclavage, qui a été longtemps, et dont peut être certaines formes aujourd’hui le sont, un des moteurs de l’expansion du capitalisme.

Le jeu capitaliste étant de minimiser les coûts et de dégager ainsi une plus-value  pour obtenir le maximum de profit,  le capitaliste doit faire pression sur les salaires, Karl Marx, va parler d’aliénation du travail et d’exploitation des travailleurs, “ l’exploitation de l’homme par l’homme”.
Une vision sociale et politique amenant aux idées que nous connaissons , de lutte des classes , de révolution sociale, jusqu’à la propriété collective des moyens de production, et donc, in fine, au Communisme.
Déjà, à son époque, de nombreux économistes avaient raisonné sur les facteurs de production, le travail et les machines, pour déduire que l’investissement qui résulte d’une épargne préalable d’une partie de la valeur produite était le moteur de l’accumulation des richesses. 

Accumulation et destruction du capital.

Ce qui est fondamental dans le raisonnement de K.Marx , c’est que le capitalisme obéit à des règles économiques qui lui permettent de croître, il va donc décrire ces mécanismes qui vont, de crise en crise , au travers des cycles,  lui permettre d’accumuler toujours plus de capital. Ce mécanisme inclut le principe de la destruction d’une part du capital.
Tout se passe comme si les crises et ce qui s’ensuit, chômage, destruction de moyens de production, comme les machines, les usines, les stocks, ajoutons les pertes financières qui sont le résultat d’un déséquilibre, d’une catastrophe naturelle, d’une  bulle financière, étaient un moyen de restructurer pour produire autrement, gagner en productivité, innover. 

On parle :

  • de crise de l’offre, (pas assez d’offre ou trop de production, inflation dans un cas ou effondrement des prix et donc des marges dans l’autre cas) 
  • de crise de la demande ( trop de demande = inflation, pas assez de demande = destruction de biens et chômage). 

A chaque fois le capitalisme, par les actions des dirigeants économiques et politiques,  se reconstitue et tente d’éviter l’erreur qui l’a amené à cette crise. En détruisant du capital on constate un appauvrissement momentané , d’une personne, d’une branche, d’un pays, mais cet effondrement provoque un rebond,  il faut reconstruire , industrialiser différemment, innover, réinvestir. De plus de nouvelles règles sont comprises, par exemple en 1929, les faillites bancaires ont créé une crise de liquidités sans précédent, entraînant de très nombreuses faillites d’autres institutions financières et celles des entreprises. En 2008, conscients de cet enchaînement néfaste, les gouvernements ont tous décidé de sauver les banques, avec d’énormes moyens financiers. La leçon de 1929 a été retenue.

La crise dramatique , la plus forte, est celle qui conduit par des mouvements sociaux à des crises nationalistes induites par une crise économique , l’Allemagne de 1933 en est un exemple. Dans une vision du 19 et 20 ème siècle les guerres permettent , en quelque sorte, de rebattre les cartes et en détruisant des biens et des moyens de production, de recapitaliser de plus belle. C’est bien ce que nous avons vécu avec la guerre de 40  et le plan Marshall ensuite.

Concentration du capital.

Il y a un autre mouvement propre au développement du capitalisme que nous appelons “ la concentration du capital ”.  Le développement économique suppose toujours plus de moyens d’investissement, d’accès à des marchés toujours plus grands. Le capitalisme ne vit pas dans un état stable , l’accumulation des profits et l’appétit pour toujours plus de profits conduisent inexorablement à la concentration du capital, les firmes alors deviennent de plus en plus grandes. Au point qu’aujourd’hui, avec l’exemple des GAFA ,elles sont dans la situation d’avoir plus de ressources et de pouvoir que beaucoup d’états.

Karl Marx montre qu’il y a donc une logique, une mécanique,  dans le capitalisme qui rend intrinsèquement possible son développement et la concentration du capital.
Il n’a pas connu le capitalisme d’aujourd’hui, devenu financier, qui a surpassé le milieu industriel, la classe ouvrière est minoritaire, les cols blancs les ont remplacés et le monde des petit-jobs a , à son tour, remplacé l’ouvrier par le travailleur pauvre. Mais cette idée de grande mécanique du capitalisme est un apport important.

Théorème de MARX : Le système économique contient ses propres mécanismes de développement pour permettre l’accumulation des richesses, quelles que soient les conditions de sa production. Il permet l’appropriation des richesses par quelques-uns, ceux qui concourent à la concentration capitalistique, qui aura elle-même une limite et qui débouchera sur un nouveau cycle. 

Bien évidemment cette vision laisse entière les questions de la rémunération de l’effort et de l’intelligence, de la motivation individuelle par la perspective de gain, du dynamisme qui en résulte et qui va permettre de créer de nouveaux biens, de générer de la valeur. 
Mais gardons cette idée, le capitalisme a son propre moteur, et il fonctionne parce qu’il prend une partie de la valeur produite , notamment par le travail, pour l’investir dans la production de biens matériels ou immatériels. La question de la répartition est donc bien une question centrale de l’économie avant même d’être une question sociale. 

L’idée clé c’est que nous devons arbitrer dans l’économie capitaliste entre investissement et consommation, salaires, dividendes ou investissement. Or cet arbitrage est justement un choix de répartition de la valeur.
Marx n’a pas été le seul à parler des cycles capitalistiques et de la destruction créatrice, Joseph Schumpeter en est en fait le vrai théoricien, dans l’économie classique. Il tirera des œuvres de Karl Marx une partie de ses idées exposées dans “Capitalisme, Socialisme et démocratie” publié en 1942. Récemment encore ce type de question est traité dans de nombreux articles.

Le capitalisme n’aurait-il comme seul but que l’enrichissement de quelques-uns ?
Non , c’est en fait un mécanisme économique et social, il n’a pas de but en soit ! 

MN :Certains le pensent et l’utilisent comme tel.
PDI : Bien sûr puisqu’il lui faut bien des acteurs.
MN: J’ai lu récemment, qu’il était le seul système qui émanait naturellement d’une société humaine ? 
PDI : C’est un raisonnement qu’il faut vérifier, qui part de la sédentarisation et de l’appropriation progressive des terres…. ensuite, par exemple,  le silo à grains qui devient l’épargne productive… etc., excellente idée pour montrer la raison d’être et le fonctionnement initial du capitalisme.

En quelque sorte il faut déterminer des conditions initiales, des axiomes, des corollaires et quelques postulats et la mécanique agit seule, poussée par les actions de tous.
Entrons dans les mécanismes endogènes de l’économie capitaliste ou  comment passe-t-on de la production aux marchés, et quel est le rôle de la monnaie ?   

VALORISER-MONÉTISER , Axiomes , corollaires et postulats. 

Axiome N°1 : Toute production de biens se fait par une destruction.(AX1)

Très important , que ce soit du temps de travail, des matières premières, des machines, … le bien produit, une voiture , un voyage , a consommé des ressources qui ont donc disparues et n’ont donc pas été utilisées à autre chose. Nous avons « appauvri le monde » 

MN : et enrichi en même temps non?  Les Cies aériennes…mais , si on arrête tout, comme en ce moment, cela provoque tout de même un certain appauvrissement ? 
PDI : Oui c’est le paradoxe on produit un nouveau bien en détruisant. Mais de quoi a-t-on enrichi le monde en consommant une glace à  la papaye venue d’Inde ou du Brésil en avion. Si nous refusons cette glace à la papaye, nous allons appauvrir les acteurs de la chaîne qui mène à cette glace. Mais sous l’angle « durable », notre nouveau paradigme, une correction s’impose – Les papayes arrivent sûrement par bateau, moindre mal ?

Corollaire 1 de l’ AX1 : Cette idée nous mène à la problématique de la limitation des ressources quelles qu’elles soient et au concept de durabilité.- n’utilisons que des ressources renouvelables et non polluantes – et si nous devons détruire une ressource, le temps par exemple, vérifions l’utilité de notre production. 

MN : Cette idée de limitation des ressources est toujours une question car quand on lit ce qui était prévu de façon dramatique pour les années 2000 ne s’est pas produit… Il y a bcp de prédictions contradictoires à ce sujet et le lobby écologiste est puissant, je ne parle pas de l’écologie si importante.
PDI : Oui c’est juste, il y a plusieurs raisons à cette erreur de prospective , outre la récupération partisane.:
– La très grande difficulté à modéliser , évoquée plus haut sur le chemin critique, est vraie pour tout le monde même pour les écologistes.
– L’évolution permanente du monde , ainsi une ressource réputée rare dans un contexte d’exploitation ne l’est plus forcément plus tard , soit parce que nous avons trouvé un produit de substitution, soit parce que nous avons découvert d’autres gisements non visibles dans l’état de la technologie antérieure ou une nouvelle possibilité technologique de l’exploiter … Le gaz de schistes en est un exemple. 
– De la même façon, de nouvelles matières sont recherchées en fonction des progrès scientifiques ou technologiques. 

En tout état de cause, les ressources ne sont pas infinies. Nous pouvons dire que nous épuisons de façon certaine ces ressources. Déjà le rapport Meadows dit du club de Rome , 1972, prédisait cette limite. (3) Ce rapport était très loin de pouvoir évaluer la réalité et ses prédictions se sont révélées inexactes. Mais au vu des dégâts écologiques , de la raréfaction réelle des certaines matières premières , de la surexploitation d’autres, nous pouvons légitimement penser que l’épuisement est un très gros risque né de cette surexploitation. Car, en effet, les matières premières ne se régénère pas à la vitesse ou nous les consommons.

Axiome N°2 : Un Bien peut être matériel on non.(AX2)

Le sens commun veut qu’un bien soit matériel, physique, nous avons étendu par la notion de consommation ce concept aux produits non matériels. Un service de voyage est un produit immatériel. Il respecte l’axiome 1.
Corollaire 1 de l’AX2  : Il faut donc étendre la notion de “production”. La production est un processus qui fournit à un agent économique un bien matériel ou immatériel qu’il accepte de consommer en l’achetant au prix proposé.
Finalement peu importe de créer un bien matériel ou immatériel dès lors qu’il a une valeur reconnue sur un marché et que la satisfaction des besoins primaires est assurée pour garder en vie un certain temps les consommateurs.!!!

Axiome N°3 : Nous pouvons produire des biens et services , Marchands ou non Marchands (AX3)

Un bien peut être marchand, c’est-à -dire entrant dans le mécanisme du marché, il a alors un prix. Un bien non-marchand, qui résulte d’une consommation de ressources mais n’a pas de prix, du moins à un moment donné. 
Les services publics, la justice, la police, l’administration des collectivités ,… entrent dans ce type de biens. Attention un bien non-marchand à une époque peut devenir marchand … ou être partiellement marchand, c’est-à-dire avoir un prix, l’éducation supérieure par exemple. 
Corollaire 1 de l’AX3 , Un bien non marchand s’évalue au mieux par la somme des coûts des ressources qu’il consomme. pour être produit. 
Corollaire 2 de l’AX3 , La valeur d’un Bien marchand est donnée par un Marché qui confronte offres et demandes. Et que nous appelons “Prix”. Nous reviendrons sur le fonctionnement du marché ultérieurement.

L’Idée de biens matériels ou immatériels, marchands ou non marchands est très importante pour comprendre la notion de production moderne. De plus, elle permet d’établir un pont avec la notion de productivité du travail. 
Explication : Aujourd’hui avec la masse disponible des heures travaillées nous pourrions produire bien plus de biens matériels ou d’aliments que nous n’en avons besoin. Pour travailler plus de deux heures par semaine, il faut donc produire d’autres biens, biens au sens large donc, dont une partie va avoir une valeur marchande et que nous  pourrons acheter ,cad consommer. Du fait de la productivité actuelle , rendements à l’hectare par exemple, nous n’avons plus besoin d’autant d’heures de travail pour produire les denrées alimentaires. Cette « productivité » permet de travailler moins donc… Mais il faut quand même gagner suffisamment d’argent pour consommer les biens produits matériels ou immatériels et ainsi assurer l’équilibre économique. 
La bonne nouvelle c’est que nous ne travaillons plus 60 heures par semaine mais plus ou moins 35 heures en France par exemple, et que nous gagnons un salaire pour ces 35 heures qui nous permet d’accéder à une satisfaction de nos besoins de toutes natures et niveaux… et qui assure globalement au système économique un équilibre entre production et consommation.

Axiome N°4 (AX4): La monnaie qui a cours, qui est évaluée sur un marché, ne vaut rien.(AX4) 

La monnaie, l’argent, billets et pièces , lignes d’écritures dans une banque ne valent  rien en soit , son coût de production, si nous le définissons comme sa valeur, est proportionnellement très faible par rapport à ce qu’elle permet d’acquérir…  Nous pouvons donc produire de la monnaie, indéfiniment, pour un coût faible. La planche à billet est une expression très significative. 
Pourtant nous lui attribuons une valeur , nous savons ce que valent 100 € par rapport au Dollar, ou par rapport à une baguette de pain produite ici en France au bout de notre rue.
Sa valeur c’est donc son pouvoir d’achat en dollar ou en baguettes de pain.
Corollaire 1 de l’AX4 : La valeur numéraire de l’argent repose sur la confiance que nous lui attribuons pour nous permettre d’acquérir les biens et services immédiats ou à venir. Si nous acceptons de stocker de la monnaie, sous toutes ses formes , c’est parce que nous espérons que plus tard , elle nous permettra d’acquérir ou de nous fournir les biens et services que nous souhaitons , ou dont nous aurons besoin.

Postulats d’action politiques économiques.

Postulat Monétariste :

Le mise sur le marché monétaire de liquidités plus ou moins importantes, la planche à billet…  , ou leur restrictions, la variation des taux d’intérêts des emprunts … ,  permet de réguler l’économie , de maîtriser l’inflation (Augmentation des prix liée au fait qu’il y a plus de demandes que d’offres) , de stimuler l’épargne et les investissements ou la consommation. 
La mise à disposition , la création de monnaie ne pose un problème que s’il n’y a pas d’offres qui lui corresponde. La friction du temps, par les événements aléatoires, les ajustements de marché expliquent une inflation des prix qui traduit l’activité économique sur les marchés. C’est-à-dire que les acteurs disposant de plus de monnaie font monter les prix. Dans ce sens, un peu d’inflation est un bon signe car elle montre un dynamisme de marché , elle permet aussi d’alléger les charges financières d’intérêts liées à la dette et donc de donner aux emprunteurs de nouvelles ressources pour consommer ou investir. Nous parlerons plus tard de la spoliation des prêteurs par l’inflation, notamment lorsque l’inflation dépasse certains taux 3, 4, 5% ? 

Postulat Keynésien : Le multiplicateur.

Si nous admettons que les acteurs économiques ne peuvent que dépenser ou épargner leurs revenus alors, la consommation ou l’épargne de ces revenus provoque une multiplication des richesses selon un multiplicateur calculable à un moment donné pour une période donnée. La succession d’un acteur à l’autre des productions et consommations/Investissements fait qu’un revenu donné à un agent économique se « multiplie » en quelque sorte dans un certain temps. C’est la prise en compte de la dimension du temps. Ainsi donner des revenus à un individu, qu’ils soient issus de son travail ou non, va mécaniquement produire un augmentation de la demande qui permettra de satisfaire des achats supplémentaires. Le multiplicateur keynésiens c’est le nombre qui exprime ce que 100 € supplémentaire de revenus vont produire comme achats dans un temps donné en passant par plusieurs acteurs économiques.
Ce principe justifie les politiques économiques de dépenses publiques pour soutenir, relancer… l’économie. Nous les appelons communément “ Politiques keynésiennes ”.

Offre et Demande.

La loi du marché : l’équilibre de l’offre et de la demande.

Pour une grande part des théories économiques, il y a une sorte de mécanisme, visible ou invisible (6), appelé la “loi du marché” , -c’est à dire, la confrontation sans obstacle de l’offre et de la demande-   , ou “les anticipations rationnelles” vont permettre d’équilibrer les prix/quantité sur les marchés . Les « anticipations rationnelles » – c’est à dire les comportements individuels et les choix raisonnables dans son environnement – , conduisent à un état d’équilibre de l’offre et de la demande. (nous verrons que cela est contestable)
Dès lors, pour ces théories économiques, toute perturbation « politique » provoquée par, une intervention sur les marchés ou une incitation pour perturber les choix rationnels, trouble ce jeu et donc ne permet pas d’obtenir le bon équilibre de l’offre et de la demande.

Toutes choses égales par ailleurs

Disons,  de façon très polémique, que les économistes font une erreur fondamentale, épistémologique.
La plupart des raisonnements de la théorie économique “classique” , celle qui prône les équilibres de l’offre et de la demande sur le marché, se termine en général par “Toutes choses égales par ailleurs* “. Nous nous permettrons d’ajouter “ et comme les choses ne sont pas égales ailleurs, tout cela est faux”.
* Pour des motifs d’analyse et de compréhension des mécanismes de base d’un phénomène économique, il peut être utile de considérer que rien ne perturbe le modèle testé , et donc que tout est stable autour, d’où la fameuse phrase. 

Nous avons compris aujourd’hui que ce postulat,  alors même qu’il excelle dans la vision mécanique,  est insuffisant, d’abord parce que les papillons (voir Théorie du chaos) existent et que d’un battement d’aile(2)  ils peuvent anéantir tous nos espoirs.
Pour en donner une explication on peut dire que la suite causale d’un événement exogène au système décrit peut, avec une probabilité évaluable , transformer le mouvement d’origine en influant sur un de ses facteurs endogènes , ensuite et surtout, les autres systèmes vont interagir avec le nôtre et le transformer. Ce mouvement n’est pas vraiment prévisible. 

Par exemple quelques influences globalisées ici en ‘système’ :

  • le système politique, par exemple des nationalisations d’entreprise privées ou une politique sociale redistributive, menées par un gouvernement , 
  • le système médiatique , arrivée d’une mode , un emballement médiatique…, 
  • le système scientifique, avec une révolution des connaissances, une découverte , ou une innovation technologique,..

Nous sommes donc obligés de tenir compte de l’environnement extérieur dans les modèles applicables au réel et c’est toute la difficulté des prévisions ou des politiques économiques. La théorie économique ne sert qu’à comprendre la logique intrinsèque de l’économie.

Pouvoir du capitaliste et l’interventionnisme d’État. 

Par ailleurs ,ces mécanismes économiques idéaux ou corrigés ne disent rien des mécanismes de pouvoir qui permettent à un “Capitaliste”, individu ou groupe, de truster tous les pouvoirs de décisions et donc de devenir lui-même une source de perturbations majeures, selon les objectifs personnels qu’il suit.

Les gouvernements souvent poussés par les opinions publiques ont alors imaginé de fixer des lois, des règles…
Cet “interventionnisme”, en économie moderne, est déjà ancien. Les Etats-Unis, luttent avec la loi Sherman dès 1890, contre les Trusts qui brident l’économie et l’esprit d’entreprise, et qui utilisent des moyens illégaux ou inhumains…(4) La mise hors jeu d’une entreprise concurrente, par exemple, peut se faire en débauchant ou en neutralisant ses employés par une manipulation syndicale , ou en faisant pression sur des consommateurs, des juges, des banques, aujourd’hui en utilisant les réseaux sociaux par exemple.

PDI : Voir le très bon film “Citizen Kane” 1941 Orson Welles, la filmographie US contient des perles sur ce sujet des trusts et des ravages du capitalisme sauvage, “on achève bien les chevaux” 1969 Sydney Pollack. 

Dans cet esprit réglementaire, la commission européenne ou les USA cherchent à contraindre les GAFA (Google, Amazon, FaceBook, Apple), à redistribuer une partie de leurs richesses aux états ou les citoyens consomment leurs produits par exemple. L’Europe et les états-nations tentent de réglementer ce “capitalisme international“ maintenant.

Déréglementation du capitalisme.

Sur ce terrain c’est donc développé avec une force incroyable un capitalisme plus ou moins réglementé qui en s’internationalisant s’est affranchi plus ou moins des règles nationales et internationales, a profité des effets de spécialisation du travail déjà décrites par Ricardo.(5) . C’est ce que nous avons appelé “ la mondialisation” pour l’aspect économique dont les corollaires sont,  la délocalisation productive et la perte d’emploi. Ce mouvement économique a provoqué, par effet consubstantiel, la naissance d’une élite ultra-riche toujours plus riche, et l’accroissement des écarts entre groupes sociaux , ressentis comme insupportables, excessifs et dangereux. Il a entrainé aussi l’appauvrissement et le non accès aux standards de consommation, d’une part croissante des individus. 

MN : Je trouve clair l’évolution depuis 45 et l’emballement qui implique la différence grandissante, connue de tous , grâce ou à cause des RS ( Réseaux Sociaux),et qui devient  une révolution latente. 
PDI : Il ne s’agit pas seulement de “différence grandissante” qui serait juste une frustration marginale,  le plus gros problème c’est la rupture du point d’équilibre entre les Classes, ou groupe sociaux, par la confiscation de l’espoir d’atteindre la satisfaction de ces besoins grâce à une redistribution “acceptable” et l’appauvrissement réel ou relatif aujourd’hui ressenti, plus qu’avant du fait, entre autres, des RS. Cette rupture va entraîner la constitution d’un mouvement social qui s’élargira.
Ne pas oublier qu’à l’époque de louis XIV le peuple savait bien que le Roi était immensément riche … C’est seulement quand la bourgeoisie est devenue extrêmement puissante et n’a plus supporté la tutelle autoritaire de la monarchie que la révolution a pu commencer.
A partir du moment où toutes les classes sociales y compris moyennes et moyennes supérieurs entrent dans cette insatisfaction globale, le risque de volonté de changement politique et économique est fort et il croît d’autant plus aisément que la diffusion massive et la transparence de l’information, l’a rendue mesurable et évidente.

MN : L’idée de rupture du point d’équilibre entre les classes est parlante. C’est une notion abstraite ou il peut y avoir des exemples ?
PDI : Déterminer un point de rupture est impossible probablement, on ne peut que le constater. Si on prends par exemple le mouvement français des gilets jaunes, qui pouvait prévoir que l’augmentation des taxes sur les carburants allait avoir cet impact ? Et le grand soutien constaté dans l’opinion ?

Nous avons regardé rapidement comment l’économie fonctionne. Comment nous produisons, grâce aux facteurs de production, comment nous déterminons la valeur des biens, grâce aux marchés, et enfin le rôle joué par la monnaie. Nous avons aussi regardé comment fonctionne la redistribution et le capitalisme , grâce à l’accumulation du capital et à ses cycles. Nous avons donc une bonne idée de la façon dont notre monde économique fonctionne aujourd’hui.

Maintenant examinons l’état de l’environnement économique , politique , géopolitique, écologiques, démographique , objet de l’ACTE 2 et intéressons-nous ensuite à ce que nous savons et pouvons faire pour influer sur le présent et l’avenir, dans l’ ACTE 3. L’ACTE 4 ou dernier ACTE et la conclusion, ouvriront les pistes de réflexions et quelques propositions. 

Paul de l’isle.

Références et renvois de l’ACTE 1 : 

Renvois : (Ces renvois pointent sur des liens Internet)

  1. Pyramide de Maslow
  2. Théorie du Chaos, le battement d’aile du papillon
  3. Rapport du Club de Rome 1972
  4. Loi Sherman , lutte contre les trusts 1890
  5. L’avantage comparé , le principe de David RICARDO 
  6. La main Invisible , l’idée d’adam Smith, 

Références : 

« Inégalités mondiales, le destin des classes moyennes, les ultra-riches et l’égalité des chances » de Branko Milanovic, 2015.

« Le Capital, critique de l’économie politique », de K.MARX, Das Kapital. Kritik der politischen Ökonomie ,1867

«Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie» , The General Theory of Employment, Interest and Money, de John Maynard KEYNES. 1936

 

Cet essai se compose ainsi : (Liens intégrés)

Préliminaires : Vade-mecum , Pourquoi et comment.
Acte 1 : Mise en perspectives et Principes d’économie politique. (Cet article) 
Acte 2 : L’État du Monde.
– Part 1 : Géopolitique
Part 2 : Démographie, Ecologie , Economie politique.
Acte 3 : Une nouvelle économie politique pour une nouvelle politique.
Acte 4 : Que pouvons nous faire, prospectives.
Acte 5 : Fin de Partie, Nous y sommes.


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